4 Juillet 1774. C'est la fête à Colmar. Marie Anne Joséphine JESSLER originaire de Valff, l'ancienne fille juive convertie au catholicisme se marie (à lire : Le baptême sensation de Maria Anna Joséphine JESSLER). Elle épouse le professeur de danse Jean Pierre SILBERT, originaire de Schöneberg près de Bingen en Rhénanie Palatinat. Le père de Jean-Pierre est charron. SILBERT s'était engagé dans l'infanterie française, la Royal Bavière crée en 1709 sous les ordres de Maximilien Emanuel von BAYERN. Il sera en service 10 ans et 6 mois. Nommé caporal dans la Compagnie WICCARD, il voyagea de part le monde et se battra même en Corse. Des velléités d'indépendance de l'île y avait été maté entre 1768 et 1769. D'octobre 1771 à septembre 1772 la compagnie de SILBERT est cantonnée à Strasbourg puis déplacée vers Colmar. Il obtient enfin durant l'hiver 1771/72 une permission bienfaisante. On s'occupe comme on peut. SILBERT est un maître danseur. En juin 1773 il soumet aux magistrats de la ville l'autorisation de pratiquer le poste de professeur de danse. Le 16 mai 1772, il demande dans la foulée sa libération militaire ce qui lui permettra de mieux honorer l'inscription toujours plus nombreuses d'élèves. Le 5 juin 1773 sa démission est  acceptée.

On ne saura jamais si une de ses élèves s'appelle Marie Anne JESSLER, quoi qu'il en soit, ils convoleront en honorable noce le 4 juillet 1774. Dans la foulée, il fait sa demande de citoyen de la ville et fonde sa propre école de danse acceptée le 11 mars 1775. Il s'installe dans le quartier de la Confrérie des charrons. L'intérêt de la haute bourgeoisie pour la jeune juive convertie était bien retombé. Fini les visites dans les familles de la haute. Fini d'être au centre de toutes les attentions. Les témoins de leur mariage seront de simples artisans : l'aubergiste "Zum Bock", 2 tailleurs et un charpentier ! En 1780, SILBERT sollicite une autre requête aux magistrats de Colmar : il leur demande de statuer pour un litige de concurrence illégale. Deux musiciens, Martin HURST et Andreas MOOG, avaient ouvert une autre école de danse dans le quartier des cordonniers ce qui lui causa des pertes de clientèle. A cette époque tout était soumis à autorisation et l'école de la Corporation des cordonniers dû fermer.

A l'époque de la résidence à Colmar de notre petite famille, 3 des 6 enfants du couple décèdent. Le 30 mars 1778 naît le petit Jean Pierre. Il sera baptisé le même jour et recevra le prénom de son père. Ce prénom avait été déjà donné à un autre frère, jumeau, malheureusement décédé. Jean Pierre grandira en compagnie de ses parents de sa soeur, Marie Joséphine, et de son frère, Dominique, dans le quartier du marché aux chevaux (1). Les parrains et marraines des enfants sont également de condition modeste : un coutelier, un menuisier, un boucher et sa femme, une fille de boulanger, un musicien et sa fille. Pour la naissance du dernier enfant, la marraine est une servante de Rouffach. Un entourage sans prétentions.

La famille désœuvrée et pauvre quittera finalement la ville de Colmar. Durant ce temps la Révolution française fait ses ravages. La petite troupe prend la direction de Mayence en Allemagne. Le père originaire du coin, retourne donc aux sources. Comme ancien soldat dans l'armée Royale, il se pourrait bien qu'il ai gardé un fort attachement à la cause royaliste. La prise de pouvoir des révolutionnaires en France n'étant pas à son goût a peut-être accéléré son choix.

Notre biographie familiale aurait pu s'évanouir dans la brume de l'histoire. Mais l'intérêt pour leur vie mérite une suite ! Jean Pierre fils, s'illustrera et deviendra un éminent écrivain et poète. Ses écrits seront repris et mis en valeur par un des compositeurs les plus connus mondialement. Vous en saurez d'avantage dans le dernier article consacré à Marie Anne Joséphine JESSLER.

(1) : La famille habitait au n°4 de la Place du marché aux chevaux, aujourd'hui Place Jeanne d'Arc, anciennement Restaurant Winstub à la Ville de Paris.

Sources :

  • Pierre PAULIN, collection alsatique du Crédit Mutuel
  • Mercis particuliers à Séverine SCHMUTZ, archiviste à la bibliothèque du Crédit Mutuel

Un peu d'histoire

De Valva à Valff, c’est tout d’abord un livre. A la fin des années 80, André VOEGEL et Rémy VOEGEL, Valffois et passionnés d'histoire, écrivent « De Valva à Valff » qui raconte l'histoire de la commune, petit village alsacien à proximité d'Obernai. L'ouvrage reprend, chapitre après chapitre, son histoire et celles de ses habitants. Dans les années 2010, Rémy VOEGEL complète la connaissance du village par divers textes édités dans le bulletin communal. 

Suite au décès d’André VOEGEL en février 2017, Rémy et Frédéric, son fils, se lance le défi de partager via le présent site les archives dématérialisées du livre, les vidéos de Charles SCHULTZ, sans oublier la publication des 40 classeurs historiques d’Antoine MULLER. Ces classeurs sont une mine d'or incroyable, car ils retracent en images toute l'histoire du village, de ses associations et de ses habitants.

Depuis, le devoir de mémoire de notre village alsacien se poursuit semaine après semaine.