David Lucien BLOCH en 1921

A quoi tient la réussite dans une vie ? L'intelligence ? la sagesse ? la chance ? le destin ? Suite des aventures de la famille BLOCH (à lire Destins croisés des descendants BLOCHDestins croisés : la vie mouvementée de Léopold BLOCH et Destins croisés : Irving BLOCH).

Après avoir appris quel fut le sort bringuebalant de la famille BLOCH en Amérique, attardons nous maintenant sur le destin d'un de leur cousin éloigné originaire de Valff. Ce dernier choisi également de tenter sa chance sur ce continent vendu comme pays de cocagne. David BLOCH est de la lignée de Moïse BLOCH qui engendra en 1761 Salomon BLOCH dont les descendants furent Sara et Léopold dont nous avons retracé l'histoire dernièrement et Lazar qui sera l'ancêtre de notre David. Je vous épargne l'ensemble de la généalogie. Cette dernière est consultable sur le site Généanet, élaborée par Robert Teitelbaum.

David donc, de génération en génération, fils de marchants de chevaux, nait à Valff le 2 mars 1868. Il est le septième et dernier enfant de Moïse et de Jacqueline (Jocobee) PICKART. Il débarque à New-York à 19 ans, le 18 mai 1887. Il prend littéralement le large avant de devoir se soumettre à son obligation militaire en Alsace. La discipline teutonne ne lui convint sans doute pas, tout comme ce fut le cas pour beaucoup de ses camarades de Valff. Petit voyage via Paris destination Le Havre, et c'est parti !

Recensement de conscription. Il est annoté que les parents ont déménagé à Barr, d'après le dire des grand-parents David serait en Amérique

David se dit s'appeler Lucien BLOCH, de nationalité américaine, sur la liste d'embarquement du Normandie

Le 12 juillet 1892 il décide de rayer définitivement son passé et accepte la naturalisation américaine. Né sous la nationalité française, élevé sous l'autorité allemande, le voilà américain. Mais son village et son pays lui manquent. Fin 1892 il repart pour la France. Avec son nouveau passeport, il peut se présenter sans risquer des représailles à Valff. Mais ce ne sont que des cousins qu'il retrouvera. Sa famille a depuis longtemps déménagé de cette maison au n°155 de la rue des forgerons, cette ancienne auberge Moser dans laquelle il avait vu le jour.

Il se souvint de Léon, son frère disparu, de Marguerite morte à 3 ans, de Henri, de Pauline, de Flora et de Mathilde, de Moïse son père et sa chère mère Jacqueline. Puis il se rend chez ses parents. On cause de tout et de rien, du bon vieux temps où ils habitaient encore tous provisoirement dans le Litzenweg à Barr, puis dans la rue de la gare, puis dans la Kehlstrasse ... du temps où la vie était belle. On se souvient de la servante Rähm OTTELIE du temps où la famille était  au complet. « Racontes-nous tout sur l'Amérique ! C'est comment ? ». David est la star du quartier et de la famille. Mais son travail le rappelle à New-York. La séparartion est comme la première fois douloureuse ; les parents ne savent s'il reverrons leur David....

Le 23 février 1893, David est de nouveau en vue des rivages de New-York. C'est à bord du navire La Normandie qu'il a traversé l'océan. David a les moyens. A 25 ans, il voyage en première classe. Il s'enregistre maintenant sous le prénom Lucien. Est-ce pour s'éviter des poursuites avec l'administration allemande ? Rappelons qu'il a fuit l'incorporation du temps de ses 20 ans. 

Recensement 1880 des habitants de Barr

4 mars 1895. Il débarque à nouveau à New-York du navire La Bretagne, toujours en première classe. En provenance de Strasbourg via Le Havre, il se présente comme fabricant d'art. Ses nombreux voyages témoignent d'une activité intense avec l'Europe. A quel moment a-t-il fondé son entreprise d'objets d'art ? Il enregistre son commerce sous le nom de L. D. BLOCH & Compagnie au 35-39 East 18th New-York sous la dénomination « Importation de Chine, verres, fabricant de lampes, nuances et nouveautés ».

35-39 Easth 18th New-York

Coupe cigare avec lampe de la Société L.D.BLOCH et Co

Pendant ce temps, son père Moïse a quelques ennuis juridiques. En 1893 il est condamné à 60 Marks pour insultes. Egalement poursuivi pour quelques irrégularités, il dépose finalement le bilan de ses affaires en 1898. Il a 70 ans. La procédure est abandonnée manque de biens solvables. Le 17 octobre 1900, David Lucien BLOCH épouse Dora OTTENBERG. En 1901 naît une petite Nathalie. Nous reviendrons plus-tard sur sa vie.

Dora OTTENBERG, photo du passeport en 1921

1915. Les affaires marchent fort. Il a étoffé son catalogue avec des articles importés de Chine. La famille habite dans un magnifique immeuble neuf au 316 de la 79th rue à New-York. C'est une rue de propriétaires aisés.

1920. Tout le monde a déménagé dans la 72 th rue qui sera plus-tard tristement célèbre avec l'assassinat de John LENNON. Sa dernière résidence se situera dans la 1st avenue à Manhattan, lieu où se trouve aujourd'hui le siège des Nations Unies. Le 13 décembre 1944 décès de David Lucien BLOCH. Il repose au cimetière Ferncliff, Westchester à New-York. Ce cimetière est connu pour sa longue liste de personnalités qui y reposent. David Lucien a une fille unique : Nathalie. Elle se mariera avec un avocat célèbre. Vous en saurez plus dans le prochain épisode. Histoire à suivre ...

Un peu d'histoire

De Valva à Valff, c’est tout d’abord un livre. A la fin des années 80, André VOEGEL et Rémy VOEGEL, Valffois et passionnés d'histoire, écrivent « De Valva à Valff » qui raconte l'histoire de la commune, petit village alsacien à proximité d'Obernai. L'ouvrage reprend, chapitre après chapitre, son histoire et celles de ses habitants. Dans les années 2010, Rémy VOEGEL complète la connaissance du village par divers textes édités dans le bulletin communal. 

Suite au décès d’André VOEGEL en février 2017, Rémy et Frédéric, son fils, se lance le défi de partager via le présent site les archives dématérialisées du livre, les vidéos de Charles SCHULTZ, sans oublier la publication des 40 classeurs historiques d’Antoine MULLER. Ces classeurs sont une mine d'or incroyable, car ils retracent en images toute l'histoire du village, de ses associations et de ses habitants.

Depuis, le devoir de mémoire de notre village alsacien se poursuit semaine après semaine.