Affichages : 2003

Procession de la Fête Dieu en 1971

Au XXe siècle, la vie paroissiale, avec ses nombreuses fêtes religieuses, rythmait l'année et l'imprégnait de profondes traditions locales. En tant que servant de messe, chantre et sacristain, j'ai beaucoup de souvenirs de ce temps passé. La conviction religieuse de mes parents m'encourageait d'assumer ces différents services dans la paroisse.

Le jour de la Fête-Dieu était marqué par la grande procession du Saint Sacrement à travers le village. La veille, les ouvriers communaux cherchaient des rejets de noisetier (Hessle) et des jeunes arbres dans la forêt qui souffrait par cette coupe ... Ils distribuaient ces verdures aux riverains du parcours de la procession. Les jeunes arbres étaient destinés aux reposoirs. Pour mettre les rejets de noisetier en place le long du parcours on utilisait un fer pointu pour creuser les trous. A cette époque la route et les trottoirs n'étaient pas encore macadamisés. Ces verdures, une fois en place, formaient un beau tracé pour le passage de la procession. Quelle profusion de fleurs, ce jour-là, c'était beau !

Le montage des quatre reposoirs commençait le matin à 6h00 avec l'aide de nombreux bénévoles et voisins. Les emplacements de ces reposoirs étaient les suivants : devant la maison d'Edmonde SCHAETZEL, dans l'arcade centrale de la mairie, devant la maison GRIMM et WERCK et celle de Charles RIEGLER. Le trajet de la procession se dessinait par un tapis vert d'herbes parsemées et de pétales de fleurs. Toutes les maisons étaient pavoisées et ornées.

Après la grande messe se formait la procession précédée par trois servants de messe dont l'un portait la croix. Suivaient les garçons et les filles des écoles. Quatre d'entre eux portaient l'Enfant Jésus. Quelques fillettes portaient des petites corbeilles blanches avec un agneau ou des pétales de fleurs. Les jeunes filles suivaient avec bannière et la statue de la Vierge. Elles étaient précédées par deux filles portant une houlette de berger. Les jeunes gens escortaient leur bannière et la statue de Saint Aloyse. La société de musique jouait des airs de procession. Suivaient les servants de messe avec les deux petites bannières blanches, les chantres et le dais porté par les membres du conseil municipal. Le majestueux dais, abritant l'ostensoir porté par le curé BERNHARD, était escorté par les sapeurs pompiers qui assuraient en même temps le service d'ordre. Derrière le dais marchaient les membres du conseil de fabrique précédés par deux porteurs d'une hampe avec lanterne.

Suivaient les hommes et les femmes avec leurs bannières respectives à savoir celle du Sacré-Coeur et celle de Sainte Anne. Les bannières étaient portées d'office par les hommes récemment mariés. La procession formée prenait le chemin tracé pour s'arrêter à chaque reposoir, où le prêtre déposait l'ostensoir en or contenant l'hostie. Après lecture de l'évangile, le prêtre donnait la bénédiction sous la sonnerie de la clique des sapeurs pompiers. Pendant la procession on priait, on chantait, la musique jouait des airs de circonstance et les servants de messe jetaient des pétales de fleurs aux pieds de M. le Curé. Les pétales de fleurs étaient recueillies tout au long de la semaine précédente dans les jardins des paroissiens. Le parcours de la procession d'une longueur de 2800 mètres était souvent pénible à cause du soleil accablant en cette période de l'année. La procession se terminait par un salut solennel à l'église avec le chant « crosser Gott ».

Dans la semaine suivante, c'est-à-dire jeudi, vendredi et samedi à l'issue de l'office du soir, il était de coutume qu'on bénisse des couronnes « Kranzle ». Celles-ci étaient achetées ou confectionnées par les familles avec du buis et piquées de fleurs multicolores en papier crêpon. Il y avait aussi une dame du Ried qui passait tous les ans au village pour vendre des couronnes en tulle. Les enfants emmenaient ces couronnes à l'église. A la fin de l'office, ils avançaient vers l'autel, remettaient les couronnes aux servants de messe qui les donnaient au prêtre pour la bénédiction en les approchant de l'ostensoir. Après le passage des enfants derrière l'autel ils reprenaient leurs couronnes bénites. Ces couronnes trouvaient leurs places soit dans la maison, soit dans les étables, porcheries ou dans les lapinières en signe de protection contre toute malédiction.

Le deuxième dimanche de la Fête-Dieu la procession avait un caractère moins imposant et un parcours sensiblement raccourci 1100 mètres. Pourtant la composition de la procession était la même et l'itinéraire était le suivant : rue haute, rue principale, rue du moulin et retour vers l'église. Il n'y avait plus de reposoirs, par contre la route et les maisons reflétaient le même décor du dimanche précédent. Il est à noter que pendant l'occupation allemande toute manifestation religieuse était interdite, donc pas de procession à la Fête-Dieu non plus.