- Écrit par : Rémy VOEGEL
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Photo de 1912 prise avant le passage de l'Empereur d'Allemagne, Roi de Prusse, Wilhelm II
🌧️ 13 mai 1908 : Le Kaiser passe… et ne s’arrête pas
Le Kaiser Guillaume II s’apprête à inaugurer en grande pompe le château du Haut-Koenigsbourg, qu’il vient tout juste de faire restaurer. Et surprise : l’itinéraire de son cortège impérial passe… par Valff ! Le départ de cette journée mémorable se fait depuis le château d’Osthouse. À Valff, c’est l’effervescence : branle-bas de combat généralisé !
Toutes les associations sont mobilisées : pompiers, écoliers, fanfares, sociétés locales... La mairie, l’école et toutes les maisons situées sur le parcours sont pavoisées de guirlandes et de drapeaux, comme pour un mariage princier. Un détachement militaire, avec fanfare, prend même position dans le village pour donner du lustre à ce jour historique.
Photo de 1912 faite à l'occasion du passage de l'Empereur d'Allemagne, Roi de Prusse, Wilhelm II
🎩 Costumes impeccables, discours bien huilé…
Les élus, en tête le maire, arborent chapeaux, haut-de-forme et costumes fraîchement brossés. Le discours, long et dithyrambique, a été répété à l’infini. Il faut marquer l’événement comme il se doit : on parle tout de même du Kaiser, l’Empereur d’Allemagne, roi de Prusse !
Les drapeaux noir, blanc et rouge du Reich flottent dans l’air... détrempé. Une pluie persistante s’est invitée, transformant les rues en bourbier. Mais qu’importe ! Pas de parapluies, et les pieds dans la boue : personne ne se plaint, l’Empereur vaut bien quelques sacrifices.
🗣️ « D’r Kaiser kommt ! »… et il repart aussi vite
Soudain, des cris s’élèvent du bas du village :
« D’r Kaiser kommt ! Le Kaiser arrive ! »
L’instant est solennel. Un silence religieux s’installe. À un signe du maître d’école, les enfants entonnent en chœur le chant qu’ils répètent depuis des semaines. Les femmes ajustent une dernière fois leur coiffe ; les hommes se redressent, le buste fier, prêts à saluer l’Histoire.
Et là, dans un vrombissement d’ingénierie allemande, la Mercedes-Benz impériale approche… puis passe.
Elle passe.
Sans s’arrêter.
Sans un mot.
Sans un salut.
🤷 Et après ? Et bien… rien
Les regards se croisent, les visages s’allongent. Les gens se regardent, haussent les épaules, évitent les questions. Le cortège a filé, indifférent et disparait dans le virage du haut-village.
Heureusement, un photographe présent ce jour-là immortalise la scène. Après tout, quelqu’un finira bien par lui acheter une photo. On pose bravement. On sourit. Ce n’est pas tous les jours qu’on peut dire :
« J’y étais, le jour où le Kaiser a traversé Valff sans s’arrêter. »
Peut-être que la pluie... ou la boue... ou simplement l’envie de rester au sec a dissuadé l’Empereur. Ses admirateurs trouveront bien une excuse.
🟥 L’honneur alsacien est sauf
Ironie de l’histoire : quelques mois plus tard, le Parlement d’Alsace adopte un drapeau régional. Rouge et blanc. Un pied de nez au Kaiser ? Sûrement.
Mais une chose est sûre : le drapeau alsacien est né…
et il ne s’est pas contenté de passer sans s’arrêter.
Sources :
- Fond Antoine MULLER
- En savoir plus : Gloire à l'Empereur !